---Back to le-hub.hear.fr

JHB / Third day / Fafi project / sept 2011

SONY DSC

Auteurs / Authors : Zen Marie, Garance Coquart, Zachara Raitt

Description : De la même manière que l’on mise sur un chiffre, les participants misaient sur un des divers objets cheap disposés sur la table de billard, achetés dans un magasin du quartier. Le fétichisme des joueurs porté habituellement sur leur chiffre favori se reportait alors sur l’objet choisi. Chaque objet était toutefois mis en relation avec un chiffre par le joueur, de sorte que le déroulement du jeu n’était pas modifié.

La partie s’est alors déroulée normalement, avec l’accord du patron et du meneur de jeu.

Axes de recherche / Research axes (Play/Urban)  : Game / Play

>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>

In situ

medium :

genre : performance

concept : Détournement du jeu du Fafi (loto illégal) dans un bar de la ville sud-africaine.

participants :

durée / duration : de 12h à 14h

ville / city : Joburg

Questions : Ce travail est l’expérience d’une démonstration et participation publique, collective voire touristique à un jeu d’argent interdit, illégal et individuel, et interrogeait les frontières entre les sphères publiques, communautaires, et privées.

>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>

Exhibit

medium : objets divers, peinture

genre : installation murale

concept : recréer un travail précédent pour le présenter à un public, explications des règles du fafi.

participants : Zen Marie, Zakara Raitt, Garance Cocquart.

durée / duration : temps de l’exposition, quelques heures

ville / city : Vansa, Johannesburg

date : septembre 2011

Questions :

>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>

Analyse critique / Critical analysis :

>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>

Protocoles (collectif) d’action / (collective) action protocols :

Performance de 12h à 14h
Détournement du jeu du Fafi (loto illégal) dans un bar de la ville sud-africaine.

De la même manière que l’on mise sur un chiffre, les participants misaient sur un des divers objets cheap disposés sur la table de billard, achetés dans un magasin du quartier. Le fétichisme des joueurs porté habituellement sur leur chiffre favori se reportait alors sur l’objet choisi. Chaque objet était toutefois mis en relation avec un chiffre par le joueur, de sorte que le déroulement du jeu n’était pas modifié. 

La partie s’est alors déroulée normalement, avec l’accord du patron et du meneur de jeu. Ce travail état aussi l’expérience d’une démonstration et participation publique, collective voire touristique à un jeu d’argent interdit, illégal et individuel, et interrogeait les frontières entre les sphères publiques, communautaires, et privées.

>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>

Fafi is a sysytem. A method, a set of social interactions. Apparently derived from Chinese dream interpretations, Fafi seems to have little relation to anything outside South Africa. at least in its specificity of operation.
In fact Fafi is an illegal, non-state-controlled form of gambling. played in parks, public spaces, bars or shabeens, Fafi relies on a central and mythological figure: ‘The Chinaman’.

Players consult a Fafi agent, telling him or her their dreams. the agent interprets their dreams assigning numbers to the images that come up in the dream. through this process the player is able to isolate a number, on which to bet money. at two times in a day, all the numbers bet on are collected. And returned to the « Chinaman » who then randomly selects the winning number. This winning number is then circulated back to all the sites of betting with winnings numbers being paid out.

The amazing thing about Fafi is the complex system of distribution and connection of an informal economy. Highly organized, yet clandestine and covert. Fafi is an example worth looking at in thinking through how systems can operate outside of the legal mechanisms of the state or private sector.

Detlev Krige has written an article about this system in african studies Volume 70, Number 1, April 2011 , pp. 3-24(22)

‘We are Running for a Living’: Work, Leisure and Speculative Accumulation in an Underground Numbers Lottery in Johannesburg

« In this article the author presents a historically-informed ethnography of a Johannesburg underground lottery. The meaning of this lottery is tied up with the local-level sociological organisation of lottery banks and the various actors who participate in it, with changing conceptions of social class, work and leisure under the conditions of growing inequality and jobless growth, and with the everyday strategies and tactics of lottery runners and punters. The author uses the instance of this lottery to argue for a contextualised, multi-levelled and historically-grounded interpretation of the notions ‘occult economies’ and ‘mysterious modes of accumulation’ (Comaroff and Comaroff 1999a, 2000). The prominence of speculative accumulation in the context of this lottery and in the livelihood strategies of those living at the margins of the state and society are strikingly similar to financial practices under the conditions of casino capitalism, financialisation and securitisation in financial markets. In this way the author links local practices of speculative accumulation with translocal processes generated by present-day neoliberal policies and financial capitalism. »

 

Extrait du mémoire de DNSEP de Garance Coquart – “Voici le premier bout, en voulez-vous un autre?” p. 28 et 31

LA GAMME – LE FAFI

En septembre dernier, alors que j’étais à Johannesburg, j’ai joué au Fafi. Le Fafi se joue sur le même principe qu’un loto: on mise une certaine somme sur un chiffre qui correspond à un «rêve chinois». Par exemple, le chiffre 1=king (roi), 3= big water (grande eau), 4= dead man (homme mort), 5= tiger (tigre), 10= eggs (oeufs), 17= white woman (femme blanche), 32= big change (grosse monnaie)… 35= pussy (chatte), 36= cock (bite).

Au fafi, on mise non seulement sur un chiffre fétiche (comme tout jeu d’argent), mais surtout sur une figure. Ce qui m’intéresse dans ce jeu, c’est justement l’association entre le chiffre et les mots. Or, le rêve est indissociable du chiffre; c’est-à-dire que le rêve correspondant au chiffre est imposé et identique à tous les joueurs. Le choix du rêve m’apparue donc totalement dérisoire puisqu’il est déduit du chiffre et inversement. Le joueur a donc le sentiment d’avoir le choix, alors qu’il ne choisit qu’un élément sur les deux.

Protocole de jeu (deux fois par jour, à 13h et 17h):

1/ on choisit un chiffre (ou un rêve) sur lequel parier.

2/ on va à la rencontre du maître du jeu (ici prénommé Dj) et on lui confie le chiffre choisi et la monnaie misée.

3/ il note notre nom et coche le chiffre nommé dans la grille.

4/ attente d’une heure trente avant le résultat.

5/ Dj contacte mystérieusement le «chinois» qui révèle le chiffre élu.

6/ le vainqueur récupère l’argent rapporté auprès de Dj.

 

En détournant le Fafi, j’ai voulu placer le joueur en interprète de ce qu’il voit, des mots et des chiffres qu’on lui présente, et lui confier une part de choix plus grande dans le jeu. Pour garder le déroulement ordinaire du Fafi, j’ai décidé d’ajouter une étape dans le choix du chiffre, qui consistait à associer un objet au rêve chinois pour déduire enfin un chiffre, parce que l’objet porte des facultés d’appropriation, de projection et d’interprétation fortes. Il y avait donc à présent 3 types de choix: un choix d’ordre matériel (l’objet), un choix verbal (le mot), et un choix numérique (le chiffre): Mes deux acolytes et moi étions munis d’objets cheap en tout genre achetés à Housewives Paradise, que nous avions auparavant exposés sur le trottoir aux passants afin qu’ils choisissent leurs objets préférés. Suite à cette expérience, nous sommes retournés dans le bar et avons présenté la gamme d’objets sur une des deux tables de billard. Puis, nous avons invité le groupe d’étudiants à venir jouer. Le fafi est une pratique illégale puisqu’elle n’est pas gérée par l’état. Dj et le patron du lieu nous avaient donc donné leur accord, à condition que le déroulement du jeu ne soit pas bousculé et que toute digression soit gardée. Un par un, les apprentis-joueurs se sont levés, ont rejoins la table, y ont choisi un objet, qu’ils ont associé à un rêve chinois déduisant le chiffre à miser; Puis, munis d’une pièce de 2 rands, sont allés livrer secrètement leur pari à Dj. Au bout d’une heure trente, le groupe entier avait parié; et nous attendions avec impatience l’appel du chiffre gagnant. Le fafi questionne quant au rôle du joueur, à la place de l’objet et à ses capacités de projections. Le jeu est soumis aux choix subjectifs du joueur, où l’ objet est considéré comme prolongement du corps.

 

Les mots et les objets étant très narratifs, le joueur, en choisissant les relations qu’il établit entre eux, invente son histoire. À quoi fait-il appel pour effectuer son choix? L’esthétique, des souvenirs, la place de l’objet sur la table, la croyance? C’est comme si le Fafi présentait une multiplicité d’histoires à construire, comme si ces listes d’objets, de figures et de chiffres étaient des éléments à grouper pour construire une narration. Je considère les éléments de ces gammes comme des mots à piocher et à juxtaposer pour écrire des histoires, aussi décousues et abstraites soient-elles. Tout comme l’acteur et le spectateur au théâtre, le joueur qui jongle entre différents statuts du langage, et, par association d’idées, de souvenirs et d’expériences personnelles, propose une interprétation à ce qu’il voit.

Casser la linéarité d’un texte, c’est donner l’illusion que l’histoire peut être multiple. Bien que le sérialisme ne se construise pas sur l’aléatoire puisque le compositeur respecte précisément les intervalles de la série, il semble être une musique décousue et disparate.

De cette manière, le conteur doit pouvoir donner l’illusion au spectateur que l’histoire dépend de lui, qu’elle est aléatoire et fluctuante, en déployant l’histoire comme une musique sérielle, structurée par des éléments narratifs et modulaires précis.

L’histoire est racontée avec une gamme de jeu qui conditionne la narration, constituée d’ objets, d’ éléments narratifs, de mots et de mouvements d’espace.

Tout au long du couloir, à intervalles réguliers, des tables éclairées par des lampes d’architectes avaient été déposées pour permettre aux clients de jubiler à la vue de leurs biens. Une femme à la perruque rousse tripotait un bracelet d’emeraudes. Plus loin un négociant libanais en antiquités protestait de l’authenticité d’un animal en bronze corrodé. Son client, un jeune irritable, portant des lunettes, affirmait qu’il s’agissait d’un faux. Utz entendit le jeune homme prononcer le mot «archifaux» et prit peur soudainement. Peut-être le Dr Frankfurter lui avait-il également vendu un faux? Ses doigts déchirèrent le papier de soie. Il examina attentivement l’objet avec une loupe et respira de nouveau.

«Hors de question! Il ne peut être qu’authentique! » *

* citation de Utz,, Bruce Chatwin, éd. Livres de poche, 1993, p. 74.

>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>

Exposition Vansa septembre 2012 par Zen Marie et Zachara Rait

>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>>

Regard de spectateur / Jean Christophe Lanquetin

Was I a spectator ? The term is probably not appropriate for such a moment. Even if everything seems to say it’s a performative moment. We go in a bar, we are a big group. The event takes place for a time. There is an esthetic dimension, a concept, etc. We could think it’s a performance. But in fact nothing really ‘happens’. And the instruction given to us before we go, is to just be there, have lunch, spend time, and at some point go to see the fafi man, and play the fafi game. But one element of the rule has been changed: an object has been added (all of the objects are visible on a billiards table), but othewhise it’s just the usual game, with a winner at the end. Nobody performs, we order beer, meal, some of us have a rest. We are customers. The unusual of it is we are a big group of customers in a bar/restaurant where we never have been before, a place for people from around, most of them regular. In a way, we invade the place.

The experience is strong because obviously i’m not a spectator. There is nothing to see, in terms of attention related to the fact of being an audience. But a lot happens, mostly in terms of feelings during the time of my presence. Precisely because I know it’s, in a way, an ‘artistic event’, and in fact i’m not shure it is. Because it’s a non daily life time, a singular time, but at the same time it is daily life. Because we play, and we have to do something, decide of the moment we do it, which is a bit strange and I don’t know what’s gonna come from that, and this action is not interesting to be observed by people in the place. but still, something happens.

I could say, we ‘inhabit’ the place as artists (referring in this to a concept by Julie Perrin). For shure, It’s not about being spectator, the experience has nothing to see with a viewer background in a theatrical or spectacular sense, but it’s about addressing to individuals. In a context of daily life, which stays as a daily life context, but with the singularity of a moment.

 

 

 

 

 

 



Les commentaires sont fermés.